Les différends étaient lourds et la politique a, comme d'hab, joué ici son rôle.
Le commandement de l'expédition a été confié à Joseph de Puisaye, un ancien général qui avait pris part à la Révolution française.
Proche des Girondins, celui-ci faisait partie des adversaires de Robespierre.
Après la chute de la Gironde, Puisaye est entré dans la clandestinité et a rejoint le camp royaliste en s'auto-proclamant chef de la chouannerie bretonne (lieutenant-général de l'armée catholique et royale de Bretagne).
Un titre que, malgré la méfiance des royalistes ayant émigré en Angleterre, il est parvenu à obtenir du comte d'Artois, l'un des frères de Louis XVI (le futur Charles X). Et cela, même si, en réalité peu de chefs chouans ont admis son autorité.
Le débarquement décidé à Quiberon devait se faire en deux temps.
Deux divisions devaient se succéder pour réaliser l'attaque.
La première division a été placée sous le commandement du comte Louis-Charles d’Hervilly, marquis de Leschelles.
Avant même que ces troupes débarquent des bateaux anglais qui les transportaient, une vive querelle a toutefois opposé Puisaye et d’Hervilly.
Le premier voulait investir tout de suite la côte morbihannaise vers laquelle les troupes chouannes avaient convergé, et prendre les Républicains de court.
Le second préférait temporiser et attendre que des reconnaissances soient faites à terre.
Une question de préséance opposait les deux hommes. Puisaye était le responsable de l’expédition mais d’Hervilly devait commander les troupes. Chose qu’il a fallu régler (au profit de Puisaye) en envoyant un courrier par côtre en Angleterre, auprès du comte d’Artois.
Mais cette dissension était également due à la méfiance qu’éprouvait d’Hervilly envers Puisaye.
D’Hervilly avait en effet reçu un courrier de l’Agence royaliste de Paris, un comité clandestin soutenu par le comte de Provence (le futur Louis XVIII).
Ce comité souhaitait établir une monarchie constitutionnelle en passant par des élections. C’est-à-dire de manière pacifique. Peu favorable au débarquement, l'Agence royaliste avait demandé aux chouans de se limiter d’une manière générale à des actions défensives.
Elle accusait par ailleurs Puisaye, grand admirateur du régime parlementaire britannique, d’être à la solde des Anglais et de ne pas forcément souhaiter le retour des Bourbons sur le trône.
Méfiant, d’Hervilly s'est donc montré très circonspect. Ce qui a fait perdre un temps précieux aux troupes royalistes et chouannes.
Ce délai a largement été utilisé par les Républicains.
Commandés par Hoche, ces derniers ont reçu des renforts des villes et région voisines.
Tant et si bien que, malgré diverses tentatives de contournement (Sarzeau, Le Pouldu) et attaques royalistes (Erdeven, Ploemel, Carnac, Landévant, Locoal-Mendon), ils sont finalement parvenus à enfermer leurs adversaires dans la nasse que représentait la presqu’île.
Ajoutez à cela le mépris que d’Hervilly, en militaire raide du col, éprouvait pour les chouans peu entrainés, peu disciplinés , et vous aurez une idée du « bazar ».
Un chaos d'autant plus prévisible qu'une partie des troupes régulières royalistes étaient composées d'anciens soldats républicains faits prisonniers et ayant accepté de passer dans l'autre camp pour éviter les terribles pontons anglais. Soldats qui se sont empressés de déserter dès qu'ils en ont eu l'occasion.
Par la suite, d'autres erreurs et méprises ont coûté cher aux royalistes lorsque la seconde division, commandée par le comte de Sombreuil a mis pied à terre.
Ses troupes étant en pleine déroute, Puisaye a réussi à regagner à la nage l'un des vaisseaux anglais. Ce qui lui a valu d'être accusé de lâcheté.
Après s'être installé plus tard au Canada, il est mort en 1827 près de Londres en étant pensionné du gouvernement anglais.
D'Hervilly, lui, est mort en Angleterre des suites des blessures reçues au combat à Quiberon. Il est inhumé dans le cimetière de l'église Saint Pancrace.