Ehouarn a écrit:En fait les immigrés et royaliste ont été carréments cons très mal inspirés de débarquer sur une presqu'île car très facilement coincés dans ce réduit, non ?
Ce n'était pas le plan prévu à l'origine : progression dans le pays environnant, mobilisation régionale des forces anti-révolutionnaires, étincelle bretonne qui (re)met le feu aux poudres d'autres régions, marche sur Paris. Ceci résumé à grosses louches.
Tout cela a été réduit à néant par plusieurs phénomènes.
D'abord les dissensions immédiatement survenues entre les chefs de l'expédition (d'Hervilly et Puisaye) sur le commandement des troupes; mais aussi le mépris affiché par l'état-major émigré envers ces gueux malodorants et indisciplinés de chouans.
Sans parler de l'erreur profonde qui a consisté à recruter dans certains régiments royalistes des prisonniers républicains détenus en Angleterre. Prisonniers dont une bonne partie s'est empressée de tourner casaque dès que l'occasion lui en a été donnée.
Bref, même si les chouans avaient commencé à tenir le pays jusque vers Locoal-Mendon et Auray, et même s'ils ont obtenu par la suite que des tentatives de diversion soient lancées à l'Ouest de Lorient ainsi qu'à l'Est par la presqu'île de Rhuys, les choses ont rapidement tourné au désastre.
On a en tant perdu de temps en querelles que l'on s'est finalement enfermé dans la souricière que représentait la presqu'île de Quiberon, tout en laissant à Hoche le délai nécessaire pour rameuter ses troupes et réunir des renforts.
Les manoeuvres politiques de l'Agence royaliste de Paris, plus proche du comte de Provence (le futur Louis XVIII) que du comte d'Artois (le futur Charles X) ont également joué un rôle important dans cette affaire.
Selon moi, l'expédition de Quiberon doit en effet une grande partie de son échec aux divergences qui opposaient les frères du défunt Louis XVI sur la conduite à tenir face aux révolutionnaires. Cela, à une époque où la cause royaliste reprenait du poil de la bête dans une opinion publique lassée par les excès de la Terreur.
L'un (le comte de Provence) préférant privilégier la voie légale ; l'autre (le comte d'Artois) étant plus favorable à la solution militaire.
Or, les partisans du comte de Provence - qu'écoutait d'Hervilly - se méfiaient grandement de Joseph de Puisaye, ancien député de la Convention, devenu proscrit puis fédérateur auto-proclamé du mouvement royaliste en Bretagne avec le soutien des Anglais et l'aval du comte d'Artois,
Grand admirateur du système politique anglais, Puisaye était un chaud partisan de la monarchie constitutionnelle, et soupçonné en tant que tel par ses adversaires de pouvoir éventuellement aider les Anglais à se débarrasser des Bourbons.
Quel rôle nos malins voisins ont-ils réellement joué dans tout cela ? Que voilà une question qu'elle est intéressante.
Une chose est en tout cas certaine : sur les côtes bretonnes comme dans tout débat politique, mettez deux gros crabes dans un petit panier et ils vont vite se chicorer.