Une sombre histoire de succession, d’espionnage et de coups bas s’est jouée selon la règle Argad lors d’un salon du jeu organisé fin octobre en Finistère sud. En voici le récit, conté par l’un de ses personnages, Guy de Troussequin. Un pauv’gars qu’a vraiment pas eu de bol
La vie est rude au XIVe siècle pour les habitants du Bas Poitou. Qu’ils soient vils gueux ou modestes nobliaux. Le chevalier Guy de Troussequin, vassal des barons du Brandois, fait partie de ces derniers.
Claudiquant comme un bourricot mal ferré depuis qu’il est tombé, bourré comme une huître, dans l’étang de la Mère Michaud, ce dernier possède pour tout bien quelques arpents de vignes dans la région de la Mothe-Achard.
Le vin aigrelet que ses paysans en tirent sur cette terre de misère de misère où même les corbeaux refusent de venir se poser est expédié depuis des lustres vers les pays nordiques. Des régions de bière fade où l’on ne fait guère de différence entre un picrate bon marché et un cidre frelaté. « L’essentiel étant de s’en mettre plein la corne, vingtdediousse ! » comme le dit avec subtilité le philosophe suédois Hagar Dunor.
Or que trouve-t-on sur la route de la Scandinavie, hein ? Je vous le donne en mille : la Bretagne, pardi ! Un territoire bien plus proche où, là non plus, il n’est pas nécessaire de discutailler plus que de raison pour s’en jeter un derrière la glotte.
De là à pousser Guy-le-boiteux à aller vanter les mérites de son vinaigre jaunâtre du côté de la Cornouaille, il n’y a qu’un pas, vite franchi. « Après tout, ce qui est bon pour les Vikings le sera bien assez pour les amateurs de cette chose oblongue, étrange et malodorante que l’on appelle l’andouille de Guéméné », se dit le père Troussequin. Le nobliau du Bas-Poitou s’étant toujours demandé si l’andouille aux infernales émanations était en fait destinée à être suspendue au plafond pour chasser les démons celtes… ou bien pour servir de piège à mouches.
Aussitôt dit, presque aussitôt fait. Un bateau amarré dans le Havre d’Olonne ne tarde pas à être chargé de tonnelets emplis d’arrache-gueule vendéen. Mais pas que…
Car les gens d’armes de Philippe VI , le roi de France, ont eu vent de l’expédition et – allez savoir pourquoi ou comment à cette époque où l’on ne voit généralement pas plus loin que le bout de son champ - la chose est remontée aux auguste oreilles du souverain.
Pingre comme pas un (« économe des derniers publics » comme dirait aujourd’hui l’un de nos ministres du budget en jurant, la main sur le cœur, qu’il n’a jamais fraudé le fisc), le roi de France saisit l’occasion pour ordonner à Troussequin d’embarquer l’un de ses espions sur le navire en question. Ce qui évitera le coût d’un voyage onéreux aux caisses du royaume. Il n’y a pas de petit profit.
Le discret personnage porte, si ma mémoire est bonne, le nom fort banal de sieur Jean du Jardin. C'est le 117e espion que le monarque envoit en Bretagne ! C'est dire si la tâche est dangereuse.
Jeannot-les-grandes-esgourdes a pour mission de contacter les Anglais, forts présents en Cornouaille, afin de leur proposer un arrangement.
L’affaire tient en trois phrases : « On arrête de se faire la guerre. On se partage la Bretagne entre Français et Anglais. Et on se fout des Bretons comme de notre première galette-saucisse ». Simple et de bon goût.
Fort arrosé comme il se doit, le voyage se déroule sans anicroches jusqu’au charmant et fort encombré port de Keranster, village cornouailler interlope (on y croise même des Navarrais) situé non loin de cette bonne ville de Quimper.
Décidément, le port de Keranster où arrive la nef de Troussequin est très fréquenté.
Dominé par un chateau, le bourg breton s'est niché le long des côtes de Cornouaille
Les navires de toutes origines y débarquent hommes et colis
Une aubaine pour les dockers syndiqués à la CGT (Confédération des Gueux Transbahuteurs) qui n'y manquent jamais de boulot
Tandis que d'autres vilains vaquent paisiblement aux travaux des champs
Arrivé à destinbation, Guy de Troussequin débarque son pinard sur la grève tandis que l'espion français s’éclipse en direction du village afin d’essayer de contacter un interlocuteur Anglais digne de ce nom.
Guy-le-besogneux ne reste pas inactif pour autant. Après avoir pris contact avec Marie Keranster, une aimable commerçante locale qui lui a écrit être intéressée par son tord-boyaux, il réserve une chambre dans l’auberge du coin. Chambre où, par mesure de sécurité, il décide de dormir en même temps que son mystérieux compagnon ainsi que de deux hommes d’armes. On n’est jamais trop prudent.
Mais en attendant le roupillon, on boit un ch’ti coup, vingtdediousse ! Soucieux de se faire des potes et de se rafraichir la glotte, le Bas-Poitevin décide de mettre un tonnelet en perce et de régaler l’aimable assistance parmi laquelle il repère vite deux tristes sires à la mine patibulaire.
Il y a là un rogue guerrier du cru, Auffret du Cosquer, méfiant comme tout Breton qui se respecte et, à l’évidence, franc comme un âne qui recule. Mais au diable les aspérités du premier contact ! « Au frais », ça lui va bien au marchand de vin blanc. D’autant plus que son vis-à-vis semble accompagné d’un Anglais aisément reconnaissable à la façon dont il enrobe les « r » et surtout à la rapidité avec laquelle ce grand soiffard boutonneux vide les gobelets de claret poitevin qu’on lui tend. Un vrai pochetron, ma parole !
« Ca pourra faire un contact intéressant pour mon envoyé royal » se dit Guy-la-boutanche, qui ne perd pas de vue les consignes royales.
Il y a là également un personnage plus discret, qui ne pipe mot, mais boit son coup sans rechigner comme tout le monde : Pierre Touhoat de Quimerc’h, plus connu sous le nom de « bâtard de Quimerc’h » eu égard aux gracieusetés que sa génitrice aurait, soutient une rumeur tenace, jadis eues avec un nobliau du coin. Ah ! L’amour !
La conversation s’engage, exploratrice et tâtonnante. On cherche à savoir qui est qui, qui veut quoi et surtout qui ne veut pas dire on ne sait trop quoi. Bref, on se teste.
Cela étant, du Cosquer et son pote de Quimerc’h comprennent vite, qu’au-delà de son amabilité de façade, Guitou-le-balourd cherche en fait à discuter de choses importantes (et discrètes) avec un représentant du roi des Godons. Roi qui, comme chacun le sait, soutient la cause de Jean de Montfort, le seigneur qui revendique le duché de Bretagne face aux prétentions de Jeanne de Penthièvre, épouse de Charles de Blois, le neveu du roi de France.
Ca va ? Vous suivez ? Ou vous avez besoin d’une aspirine ?
On boit. On boit. A force d’échanges sybillins et de cogitations fumeuses, une offre de rencontre entre Guy de Troussequin et un Anglais finit par être obtenue par le Bas Poitevin. Mais le temps passe et la nuit tombe. Allez, les mecs ! On verra ça tout ça demain !
Marie Keranster, l'hôtesse aubergiste reçoit ses clients sur la place du village
Une scène typique et pittoresque de la vie bretonne vue ici de plus haut par un drone médiéval
Chacun part se coucher. Un homme d’armes du bâtard de Quimerc’h étant curieusement dépêché à l’auberge par son maître pour, soit disant, assurer la sécurité du seigneur vigneron et de son entourage. Bizarre, bizarre. Pas de doute, la méfiance règne.
A juste titre ! Au beau milieu de la nuit, une ombre se glisse en effet dans la chambrée qu’occupent le Poitevin et le 117e espion du roi de France. Réveillé en sursaut, Guy qui ne dort que d’un œil surprend un inconnu armé d’une dague sanglante. Arme avec laquelle le même sbire vient de sonder perfidement les tripes de l’émissaire du roi de France… qui, du coup, en est mort d’étonnement.
L’assassin est monté dans la chambre par une échelle extérieure à laquelle le Bas-Poitevin, dans sa grande naïveté, n’avait pas prêté attention. L’inconnu va quitter les lieux du crime par le même moyen, avant de disparaitre dans la nuit, poursuivi en vain par des gardes trop lourdement équipés.
Diante ! Fichtre ! Palsembleu, hildepute et corneguidouille ! Guy de Troussequin éructe de rage. Qui a commis le crime ? Qui était au courant de ses menées secrètes ? Auffret de Cosquer lui aurait-il joué un tour de cochon, animal au demeurant fort consommé en Bretagne ? Ou bien le coup vient-il d’ailleurs ?
Je laisse à d’autres le soin d’expliquer les tréfonds de cette ténébreuse affaire, plus alambiquée qu’elle n’en a l’air.
Le corps suriné et sans vie de l'émissaire du roi de France assassiné par un inconnu. Un moine le veille en psalmodiant ses bondieuseries
Mais une chose est sûre : un tel affront réclame vengeance ! Même en Bretagne, un Français ne peut être traité de la sorte. Il faut réagir !
Bien que fort secoué, le Bas Poitevin commence toutefois par l’essentiel : foutre le camp, nom d’un tonneau percé ! Fuir le village et se mettre à l’abri.
Troussequin sait où se diriger. Car il a appris que tout un parti de soldats du roi Philippe VI traine ses chausses sur une plage voisine, bêtement occupé à ramasser des coquillages et à édifier de mignons châtelets de sable en attendant qu’on lui donne l'ordre de se mettre au turbin. Y a rien de plus triste qu’un soudard désoeuvré.
Rejoints par le Bas-Poitevin, dont le moral n’est pas au plus haut, les soldats sautent sur l’occasion. Enfin du taf, du vrai ! Ils décident de prendre les armes et de bloquer la route menant au village tant que l’affaire n’aura pas été tirée au clair.
Le hic, c’est que les seigneurs bretons et les mercenaires qui les accompagnent, alertés par tout ce tintouin et toujours aussi méfiants que les intrus, ont décidé de faire de même de leur côté.
L’ultimatum de vider les lieux qui leur est adressé par les Français les conforte dans leur décision. « Vous voulez la baston ? Bien ! Vous aurez la baston ! » grommelle le Frais Cosquer tandis que son comparse de Quimerc’h invite les mercenaires qui l’accompagnent à se saisir de leurs arcs.
"Pas folle la guêpe. Un coup de coutelas, ca suffit. Je me casse ! ". Après l'assassinat, Guy de Troussequin opte pour la fuite en évitant tout ce qui lui parait suspect
La suite ? Elle ne sera finalement que gnons, horions et trépas en série du côté des Français. Leurs solides combattants étant bien mal servis par un Guy de Troussequin (votre serviteur, vous l’aurez compris) plus habile à ouvrir une boutanche de picrate qu’à faire les 6 au dé qu'exige la règle Argad . Fainéant, va !
Cernés et percés de toutes parts, hâchés fin, fin, fin ou pis, réduits au piteux état de prisonniers, les franchouillards vont finir par baisser pavillon. Tandis que le Guitou, toujours aussi claudiquant, disparaitra dans l'atroce mêlée.
Est-il mort ? A-t-il réussi à s'enfuir. Seul Dieu (c'est à dire Patrice, l'arbitre de la rencontre) le sait.
Rude époque que celle-là tout de même, et fort triste épilogue. Mais l'aventure s'est avérée trépidante.
Alors, à quand la suite ?
Alertés par Troussequin, les Français commencent à se mettre en ordre de bataille
Leurs adversaires bretons ne sont pas en reste. Non mais !
Aussi sournois et perfides que leur patron, les mercenaires du bâtard de Quimerc'h surgissent de derrrière une haie
Et la bataille s'engage
Les chevaliers français cherchent bien à interdire la route menant au village
Mais rien n'y fait. L'un après l'autre, ils passent de vie à trépas. Fichu métier que celui de soldat !
PLANTONS D’ABORD LE DECOR
La vie est rude au XIVe siècle pour les habitants du Bas Poitou. Qu’ils soient vils gueux ou modestes nobliaux. Le chevalier Guy de Troussequin, vassal des barons du Brandois, fait partie de ces derniers.
Claudiquant comme un bourricot mal ferré depuis qu’il est tombé, bourré comme une huître, dans l’étang de la Mère Michaud, ce dernier possède pour tout bien quelques arpents de vignes dans la région de la Mothe-Achard.
Le vin aigrelet que ses paysans en tirent sur cette terre de misère de misère où même les corbeaux refusent de venir se poser est expédié depuis des lustres vers les pays nordiques. Des régions de bière fade où l’on ne fait guère de différence entre un picrate bon marché et un cidre frelaté. « L’essentiel étant de s’en mettre plein la corne, vingtdediousse ! » comme le dit avec subtilité le philosophe suédois Hagar Dunor.
Or que trouve-t-on sur la route de la Scandinavie, hein ? Je vous le donne en mille : la Bretagne, pardi ! Un territoire bien plus proche où, là non plus, il n’est pas nécessaire de discutailler plus que de raison pour s’en jeter un derrière la glotte.
De là à pousser Guy-le-boiteux à aller vanter les mérites de son vinaigre jaunâtre du côté de la Cornouaille, il n’y a qu’un pas, vite franchi. « Après tout, ce qui est bon pour les Vikings le sera bien assez pour les amateurs de cette chose oblongue, étrange et malodorante que l’on appelle l’andouille de Guéméné », se dit le père Troussequin. Le nobliau du Bas-Poitou s’étant toujours demandé si l’andouille aux infernales émanations était en fait destinée à être suspendue au plafond pour chasser les démons celtes… ou bien pour servir de piège à mouches.
LE ROI DE FRANCE S’EN MELE
Aussitôt dit, presque aussitôt fait. Un bateau amarré dans le Havre d’Olonne ne tarde pas à être chargé de tonnelets emplis d’arrache-gueule vendéen. Mais pas que…
Car les gens d’armes de Philippe VI , le roi de France, ont eu vent de l’expédition et – allez savoir pourquoi ou comment à cette époque où l’on ne voit généralement pas plus loin que le bout de son champ - la chose est remontée aux auguste oreilles du souverain.
Pingre comme pas un (« économe des derniers publics » comme dirait aujourd’hui l’un de nos ministres du budget en jurant, la main sur le cœur, qu’il n’a jamais fraudé le fisc), le roi de France saisit l’occasion pour ordonner à Troussequin d’embarquer l’un de ses espions sur le navire en question. Ce qui évitera le coût d’un voyage onéreux aux caisses du royaume. Il n’y a pas de petit profit.
Le discret personnage porte, si ma mémoire est bonne, le nom fort banal de sieur Jean du Jardin. C'est le 117e espion que le monarque envoit en Bretagne ! C'est dire si la tâche est dangereuse.
Jeannot-les-grandes-esgourdes a pour mission de contacter les Anglais, forts présents en Cornouaille, afin de leur proposer un arrangement.
L’affaire tient en trois phrases : « On arrête de se faire la guerre. On se partage la Bretagne entre Français et Anglais. Et on se fout des Bretons comme de notre première galette-saucisse ». Simple et de bon goût.
Fort arrosé comme il se doit, le voyage se déroule sans anicroches jusqu’au charmant et fort encombré port de Keranster, village cornouailler interlope (on y croise même des Navarrais) situé non loin de cette bonne ville de Quimper.
Décidément, le port de Keranster où arrive la nef de Troussequin est très fréquenté.
Dominé par un chateau, le bourg breton s'est niché le long des côtes de Cornouaille
Les navires de toutes origines y débarquent hommes et colis
Une aubaine pour les dockers syndiqués à la CGT (Confédération des Gueux Transbahuteurs) qui n'y manquent jamais de boulot
Tandis que d'autres vilains vaquent paisiblement aux travaux des champs
C'EST MA TOURNEE !
Arrivé à destinbation, Guy de Troussequin débarque son pinard sur la grève tandis que l'espion français s’éclipse en direction du village afin d’essayer de contacter un interlocuteur Anglais digne de ce nom.
Guy-le-besogneux ne reste pas inactif pour autant. Après avoir pris contact avec Marie Keranster, une aimable commerçante locale qui lui a écrit être intéressée par son tord-boyaux, il réserve une chambre dans l’auberge du coin. Chambre où, par mesure de sécurité, il décide de dormir en même temps que son mystérieux compagnon ainsi que de deux hommes d’armes. On n’est jamais trop prudent.
Mais en attendant le roupillon, on boit un ch’ti coup, vingtdediousse ! Soucieux de se faire des potes et de se rafraichir la glotte, le Bas-Poitevin décide de mettre un tonnelet en perce et de régaler l’aimable assistance parmi laquelle il repère vite deux tristes sires à la mine patibulaire.
Il y a là un rogue guerrier du cru, Auffret du Cosquer, méfiant comme tout Breton qui se respecte et, à l’évidence, franc comme un âne qui recule. Mais au diable les aspérités du premier contact ! « Au frais », ça lui va bien au marchand de vin blanc. D’autant plus que son vis-à-vis semble accompagné d’un Anglais aisément reconnaissable à la façon dont il enrobe les « r » et surtout à la rapidité avec laquelle ce grand soiffard boutonneux vide les gobelets de claret poitevin qu’on lui tend. Un vrai pochetron, ma parole !
« Ca pourra faire un contact intéressant pour mon envoyé royal » se dit Guy-la-boutanche, qui ne perd pas de vue les consignes royales.
Il y a là également un personnage plus discret, qui ne pipe mot, mais boit son coup sans rechigner comme tout le monde : Pierre Touhoat de Quimerc’h, plus connu sous le nom de « bâtard de Quimerc’h » eu égard aux gracieusetés que sa génitrice aurait, soutient une rumeur tenace, jadis eues avec un nobliau du coin. Ah ! L’amour !
La conversation s’engage, exploratrice et tâtonnante. On cherche à savoir qui est qui, qui veut quoi et surtout qui ne veut pas dire on ne sait trop quoi. Bref, on se teste.
Cela étant, du Cosquer et son pote de Quimerc’h comprennent vite, qu’au-delà de son amabilité de façade, Guitou-le-balourd cherche en fait à discuter de choses importantes (et discrètes) avec un représentant du roi des Godons. Roi qui, comme chacun le sait, soutient la cause de Jean de Montfort, le seigneur qui revendique le duché de Bretagne face aux prétentions de Jeanne de Penthièvre, épouse de Charles de Blois, le neveu du roi de France.
Ca va ? Vous suivez ? Ou vous avez besoin d’une aspirine ?
On boit. On boit. A force d’échanges sybillins et de cogitations fumeuses, une offre de rencontre entre Guy de Troussequin et un Anglais finit par être obtenue par le Bas Poitevin. Mais le temps passe et la nuit tombe. Allez, les mecs ! On verra ça tout ça demain !
Marie Keranster, l'hôtesse aubergiste reçoit ses clients sur la place du village
Une scène typique et pittoresque de la vie bretonne vue ici de plus haut par un drone médiéval
L’AUBERGE ROUGE
Chacun part se coucher. Un homme d’armes du bâtard de Quimerc’h étant curieusement dépêché à l’auberge par son maître pour, soit disant, assurer la sécurité du seigneur vigneron et de son entourage. Bizarre, bizarre. Pas de doute, la méfiance règne.
A juste titre ! Au beau milieu de la nuit, une ombre se glisse en effet dans la chambrée qu’occupent le Poitevin et le 117e espion du roi de France. Réveillé en sursaut, Guy qui ne dort que d’un œil surprend un inconnu armé d’une dague sanglante. Arme avec laquelle le même sbire vient de sonder perfidement les tripes de l’émissaire du roi de France… qui, du coup, en est mort d’étonnement.
L’assassin est monté dans la chambre par une échelle extérieure à laquelle le Bas-Poitevin, dans sa grande naïveté, n’avait pas prêté attention. L’inconnu va quitter les lieux du crime par le même moyen, avant de disparaitre dans la nuit, poursuivi en vain par des gardes trop lourdement équipés.
Diante ! Fichtre ! Palsembleu, hildepute et corneguidouille ! Guy de Troussequin éructe de rage. Qui a commis le crime ? Qui était au courant de ses menées secrètes ? Auffret de Cosquer lui aurait-il joué un tour de cochon, animal au demeurant fort consommé en Bretagne ? Ou bien le coup vient-il d’ailleurs ?
Je laisse à d’autres le soin d’expliquer les tréfonds de cette ténébreuse affaire, plus alambiquée qu’elle n’en a l’air.
Le corps suriné et sans vie de l'émissaire du roi de France assassiné par un inconnu. Un moine le veille en psalmodiant ses bondieuseries
VENGEAANNNNCE !
Mais une chose est sûre : un tel affront réclame vengeance ! Même en Bretagne, un Français ne peut être traité de la sorte. Il faut réagir !
Bien que fort secoué, le Bas Poitevin commence toutefois par l’essentiel : foutre le camp, nom d’un tonneau percé ! Fuir le village et se mettre à l’abri.
Troussequin sait où se diriger. Car il a appris que tout un parti de soldats du roi Philippe VI traine ses chausses sur une plage voisine, bêtement occupé à ramasser des coquillages et à édifier de mignons châtelets de sable en attendant qu’on lui donne l'ordre de se mettre au turbin. Y a rien de plus triste qu’un soudard désoeuvré.
Rejoints par le Bas-Poitevin, dont le moral n’est pas au plus haut, les soldats sautent sur l’occasion. Enfin du taf, du vrai ! Ils décident de prendre les armes et de bloquer la route menant au village tant que l’affaire n’aura pas été tirée au clair.
Le hic, c’est que les seigneurs bretons et les mercenaires qui les accompagnent, alertés par tout ce tintouin et toujours aussi méfiants que les intrus, ont décidé de faire de même de leur côté.
L’ultimatum de vider les lieux qui leur est adressé par les Français les conforte dans leur décision. « Vous voulez la baston ? Bien ! Vous aurez la baston ! » grommelle le Frais Cosquer tandis que son comparse de Quimerc’h invite les mercenaires qui l’accompagnent à se saisir de leurs arcs.
"Pas folle la guêpe. Un coup de coutelas, ca suffit. Je me casse ! ". Après l'assassinat, Guy de Troussequin opte pour la fuite en évitant tout ce qui lui parait suspect
GASP ET HILDEPUTE ! ON EST MORTS !
La suite ? Elle ne sera finalement que gnons, horions et trépas en série du côté des Français. Leurs solides combattants étant bien mal servis par un Guy de Troussequin (votre serviteur, vous l’aurez compris) plus habile à ouvrir une boutanche de picrate qu’à faire les 6 au dé qu'exige la règle Argad . Fainéant, va !
Cernés et percés de toutes parts, hâchés fin, fin, fin ou pis, réduits au piteux état de prisonniers, les franchouillards vont finir par baisser pavillon. Tandis que le Guitou, toujours aussi claudiquant, disparaitra dans l'atroce mêlée.
Est-il mort ? A-t-il réussi à s'enfuir. Seul Dieu (c'est à dire Patrice, l'arbitre de la rencontre) le sait.
Rude époque que celle-là tout de même, et fort triste épilogue. Mais l'aventure s'est avérée trépidante.
Alors, à quand la suite ?
Alertés par Troussequin, les Français commencent à se mettre en ordre de bataille
Leurs adversaires bretons ne sont pas en reste. Non mais !
Aussi sournois et perfides que leur patron, les mercenaires du bâtard de Quimerc'h surgissent de derrrière une haie
Et la bataille s'engage
Les chevaliers français cherchent bien à interdire la route menant au village
Mais rien n'y fait. L'un après l'autre, ils passent de vie à trépas. Fichu métier que celui de soldat !